Adossée à une forêt de pins maritimes et de chênes lièges et s’étirant sur 3 kilomètres, la plage de Labenne est l’une des plages les plus belles, mais surtout l’une des plus poissonneuses en France. Ouverte sur l’océan Atlantique, elle se situe entre les communes d’Ondres et de Capbreton, dans le département des Landes, avec son gouf réputé mondialement – un gouf est un canyon sous-marin, c’est-à-dire une entaille profonde dans le talus continental, dont l’extrémité est très proche du littoral et aspire directement les sédiments en transit le long de la côte.
Ce “haut spot” abrite une très grande variété de poissons, des sparidés comme la dorade royale, la dorade grise, la dorade rayée plus connu sous le nom de rayée, ou encore le sar commun. Il n’est d’ailleurs pas rare de capturer de très jolis spécimens en hiver, dépassant régulièrement les 2 kg, venus se nourrir avant la période de reproduction.
Bien entendu, les bars et bars mouchetés, eux aussi, affectionnent le sable fin de Labenne. Dès que les eaux se réchauffent à partir de la mi-mai, ce sont des espèces bien différentes qui prennent possession des lieux. La liche glauque, la bogue, le maquereau espagnol, la vive royale, l’ombrine (Umbrina canariensis) et sans oublier le poisson que bien des pêcheurs recherchent, le maigre, appelé aussi courbine (Argyrosomus regius).
Il faut savoir qu’autrefois, le lit de l’Adour passait à quelques centaines de mètres de la plage de Labenne. À 10 mètres du bord, il y a déjà plus de 5 mètres d’eau, et à plus de 100 mètres on peut atteindre des profondeurs avoisinant les 15 mètres. Cette profondeur d’eau regorge de nourriture et attire forcément de nombreux poissons. C’est justement ce qui rend ces rivages si différents de toutes les autres plages landaises où, habituellement, celles-ci sont connues pour être peu profondes et avec notamment leurs fameuses baïnes.
Aujourd’hui, c’est le déroulement de l’une de nos parties de pêche en surfcating que nous allons tenter de vous faire vivre et partager. J’aurai le plaisir d’être accompagné de mes trois amis de longue date – Sébastien, Éric, Pascal ainsi que sa fille Elsa, déjà elle aussi bien piquée par le virus –, amoureux de cette pratique de la pêche en bord de mer. Fort de leur expérience acquise à travers différentes compétitions auxquelles ils ont participé (championnats départementaux, régionaux et nationaux), ces pêcheurs vont nous prodiguer quelques-unes de leurs astuces afin de prendre un maximum de plaisir au bord de l’eau.
L’ombrine, poisson peu connu
L’ombrine, appelée aussi l’ombrine-bronze ou ombrine du large, possède un corps allongé, comprimé latéralement. Le profil de son dos est bombé et sa tête arrondie. Un barbillon mentonnier est présent sous la mâchoire, elle-même orientée en position inférieure. Elle possède deux nageoires dorsales distinctes. Une membrane noire est présente au bord postérieur de l’opercule. Sa robe est grise-argenté avec, sur son dos et ses flancs, des stries obliques irrégulières jaune d’or à bordures foncées. La partie ventrale est blanc argenté. La nageoire caudale est à bord légèrement concave.
Sa longueur moyenne est de 30 à 50 cm sur la côte Atlantique ; elle peut atteindre 1 mètre pour 12 kilos dans d’autres pays. C’est un poisson carnivore qui se nourrit en petits groupes d’invertébrés présents dans le sable. Ses proies préférées sont les crustacés, les mollusques, mais également une grande variété de vers de mer.
La reproduction a lieu au printemps, entre mai et juin.
Ici, sur la côte Atlantique, nous avons la chance de pouvoir prendre quasiment toute l’année ce magnifique poisson. On le trouve en général dans des zones assez profondes, comme sur les plages de Labenne et d’Hossegor. La période où elle est très présente dans les Landes est d’avril à juillet ; il n’est pas rare de faire des doublés, voire des triplés, durant cette période.
Concernant les techniques de pêche, il faut rester dans la simplicité. Lorsque la mer est calme et vous permet de pêcher avec 3 empiles (en 80 cm), faîtes-le ! Si la mer est plus agitée, mettez 2 empiles (100 à 150 cm), voire une seule mais plus longue (jusqu’à 300 cm). Pour la grosseur de vos empiles, optez pour du 26 à 35/100e ; ce n’est pas un poisson très regardant, il est assez vorace. Ne faites pas l’erreur cependant de pêcher trop fin car c’est un poisson très combatif et vous risqueriez de casser vos empiles.
Pour les appâts, si l’on vous dit que l’ombrine se laisse prendre à tout, cela ne serait pas exagéré ! Avec du recul, ses appâts dits préférés et qui donnent le plus de résultat sont : la grosse arénicole éviscérée (vergane), le ver américain et le couteau.
La partie de pêche
C’est décidé, le lieu de pêche sera la plage Casanova à Labenne ! Avec une marée haute à 9h, une houle prévue de 1m30 et pas de vent, ce sont les conditions rêvées sur ce spot pour espérer prendre du poisson. Rendez-vous à 6h30 sur le parking avec nos amis et l’équipe de tournage du magazine venue pour l’occasion. Les commentaires vont bon train, histoire de faire descendre la pression, en se chambrant gentiment sur la partie de pêche précédente… Un beau poisson manqué pour Pascal, une belle ombrine prise par Éric, etc… ; c’est visiblement une grosse envie et belle ambiance qui règnent entre nous tous ce matin.
Une fois arrivé en haut de la dune, nous scrutons la mer et ces bords de côtes afin d’y déceler les différents reliefs et tenter d’y apercevoir un trou le plus profond possible. En effet, “lire la mer” est une approche indispensable de notre pratique, les éventuelles “cavités” étant susceptibles de retenir le poisson de passage en quête de nourritures. Il faut toutefois se dépêcher car nous sommes déjà sur les deux dernières heures du montant, période d’activité importante sur cette zone à privilégier. Je me décale vers la gauche, en bordure d’un très joli trou, permettant à mes camarades de s’installer et prospecter son centre, juste en face de notre campement du jour.
Une fois de plus, toutes ces années passées au bord de l’eau nous aident à mieux comprendre, à mieux appréhender les postes à favoriser afin d’y placer plus judicieusement nos cannes. Même si nous restons convaincus que nous ne finirons jamais d’apprendre, tellement les choses peuvent être différentes en fonction des espèces, des marées, ou encore des périodes de l’année… Le bonheur y est encore plus satisfaisant lorsque nous arrivons à trouver du poisson et, qui plus est, une espèce ciblée en particulier.
Le choix du jour va s’avérer payant car à peine la deuxième canne mise à l’eau qu’une touche puissante et très franche me fait comprendre tout de suite qu’il s’agit d’un joli poisson. Un combat s’engage et, là encore, l’expérience de pêche me rappelle rapidement que dans le dernier rouleau du bord, il faut éviter au maximum de laisser du mou sinon la décroche sera quasi certaine. Au bout de 4 à 5 minutes de bataille, c’est un magnifique doublé de poissons qui vient s’échouer sur le sable, “une belle maigrette et une ombrine”. Nous ne pouvions pas mieux commencer cette journée ! La robe de ce sciaenidé est juste incroyable avec une coloration très caractéristique, plus ou moins argentée avec des lignes jaunâtres obliques. L’ombrine possède également un court barbillon mentonnier. Nous aurons tout juste le temps d’immortaliser ces prises que Sébastien part lui aussi en courant à sa canne totalement détendue. Les ombrines recherchées sont bien là et en nombre visiblement.
Quel plaisir de voir Elsa remettre ce beau poisson à l’eau, elle le reprendra dans peu de temps, c’est certain. Éric et Pascal, quant à eux, prendront 2 petits bars, un franc et un moucheté, et les prises d’ombrines s’enchaîneront pendant plus d’1h30.
Des montages adaptés
Alors que nous arrivons à l’étale de marée, Pascal se dit que c’est le moment de mettre à l’eau son montage fétiche afin d’espérer dénicher une belle raie. Même si c’est effectivement un peu tôt dans la saison, on ne sait jamais… Cela pourrait nous permettre de faire de belles images ! Son montage est constitué d’un traînard de 2 mètres en 37/100e, avec 2 hameçons en tandem et un lançon sur chaque hameçon. Il vous conseille de prendre des hameçons à tige longue pour que vos appâts tiennent mieux avec le courant et surtout lors du lancer. Ce matin-là, hélas, nous n’aurons pas la chance de pouvoir prendre une belle raie, mais il fallait le tenter.
Après plusieurs heures de pêche, nous nous retrouvons autour d’un bon café et d’une “chocolatine” – et oui dans les Landes on ne dit pas pain au chocolat. Ces moments sont toujours très enrichissants, car ils nous permettent souvent de faire un point sur la première partie de pêche et, en fonction des informations récoltées, essayer de s’adapter aux tendances du jour. Par exemple, nous pouvons observer très clairement qu’aujourd’hui les montages de 2 empiles de 150 cm et 3 empiles de 100 cm font la différence, avec 2 types de plombs, le sporteen et le portugais de 150 et 170 grs. Sur les plages landaises, il ne faut surtout pas hésiter à mettre du fil assez gros, du moment que l’on privilégie le fluorocarbone. Le bon compromis étant du 23 au 35/100e.
Comme précisé juste avant, les hameçons à tige longue maintiendront beaucoup mieux vos appâts, notamment lors des lancers appuyés ou dans les forts courants. Nous vous conseillons également de ligaturer tous vos appâts avec du fil élastique classique. Cette technique, rapide et facile à mettre en œuvre finalement lorsque le ver est sur l’aiguille, permet un maintien nettement supérieur de vos appâts et résiste bien mieux aux attaques des petits poissons.
Débriefer pour savoir s’adapter
Nous voilà désormais en marée descendante. Les touches se faisant plus rares, il va nous falloir changer la tactique de pêche. Les cannes hybrides sont mises de côté pour laisser la place à des cannes plus raides (type power) pour aller chercher de la distance au lancer. D’ailleurs, afin d’optimiser cette réflexion, pensez à mettre du fil plus fin dans vos moulinets.
Pour la bordure, on peut très bien utiliser du 28, voire du 25/100e. Mais, pour gagner encore en distance, le 16 au 18/100e est à privilégier. Il faut bien sûr mettre une arrachée, ou queue de rat, qui partira de 18/100e pour finir en 50/100e, sinon c’est la casse assurée.
Un joli lancer pour Sébastien et Pascal pour voir si le poisson ne se situe pas plus au large, alors qu’Éric et moi pêcherons à mi-distance afin d’optimiser ainsi nos chances de retrouver du poisson.
Quelques minutes se passent et c’est la canne de Sébastien qui se manifeste en premier, avec un très joli marbré qui se laissera prendre sur une dure rouge. Il ne m’en faudra pas plus pour remonter et lancer également plus au large.
Nous terminerons cette matinée avec 2 nouvelles ombrines et 2 autres jolis marbrés, mais cette fois-ci à l’arénicole. Une fois de plus, il nous aura fallu nous adapter tout au long cette matinée de pêche, et, en fait, c’est en cela, je pense, que réside le secret de notre passion. Comprendre et s’adapter au poisson nous fascine et son prélèvement reste finalement assez accessoire aux yeux des passionnés que nous sommes. La pratique de la pêche en surfcasting demande beaucoup de passion à la vue du travail de sa mise en œuvre, de sa pêche pas toujours facile, de l’entretien du matériel qu’elle demande… Sans parler des mollets qu’il faut avoir pour marcher dans le sable fin, les bras chargés, ou encore le sable dans les chaussures, la voiture, la maison… Mais qu’est-ce que c’est bon !
La pêche reste un beau et noble loisir, il nous faut savoir partager cette passion. C’est très difficile de faire venir des jeunes à cette pêche, c’est pour cela qu’il est primordial de véhiculer les plus belles valeurs et la meilleure image possible aux gens qui nous entourent. Les Landes restent une terre de traditions et la pêche en surfcating en fait partie, il faut que nous la préservions au maximum pour les générations futures ◆
Le club de pêche de Labenne
En 2017, une bande de copains, qui pratiquait la compétition et la pêche en surfcasting, s’est lancé le défi de créer un club de pêche sur la commune de Labenne. Aujourd’hui, le club est affilié à la fédération de pêche en bord de mer et compte plus de 45 licenciés, de 5 à plus de 75 ans. Il n’y a pas de limite d’âge pour pratiquer une passion. Le président du club, Patrice Bonnet, est un vrai passionné et un amoureux de la plage de Labenne ; il y réside à quelques centaines de mètres d’ailleurs. Dans le club, que l’on soit un pêcheur depuis plusieurs années où que l’on débute, la porte est ouverte à tous. Un calendrier de sorties club a été mis en place. Ces sorties dites “loisirs” sont gérées par Étienne Sorin – lui aussi une personnalité bien connue dans le canton –, un pur passionné et amoureux de la pêche, qui sait transmettre son savoir.
Le club organise un concours fédéral, qui compte pour le championnat départemental, ainsi qu’un duo depuis 2019, “Les 12 heures de Labenne”, dont beaucoup s’en souviennent puisqu’un record historique de plus de 250 kg de poissons a été enregistré. Depuis cette année, le club est en partenariat avec la marque Sunset qui nous aide énormément et nous offre de gros avantages. Nous en profitons pour les remercier une nouvelle fois, pour la confiance qu’ils nous accordent, sans oublier l’incontournable magasin “L’ami pêcheur”, géré par Cédric Graciet, sans qui tout cela ne serait possible.
Si vous aimez la pêche simplement et entre amis, n’hésitez pas à nous contacter : labenneoceansc@gmail.com